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2 Pierre INTRODUCTION

INTRODUCTION
Un testament spirituel
A plusieurs reprises, les pages de la Bible offrent au lecteur un message rédigé sous la forme d'un testament. Ainsi, dès Genèse 49, Jacob mourant adresse aux douze patriarches, ancêtres des tribus d'Israël, une série de prédictions ou d'avertissements. Après quoi il annonce sa mort imminente et donne ses instructions pour son ensevelissement. Le Nouveau Testament prend le relais avec les pages sublimes du quatrième évangile (Jn 14 à 17) où Jésus confie à ses disciples ses intentions ultimes pour la vie de l'Eglise et le salut du monde. D'une manière analogue, dans les Actes, le discours de l'apôtre Paul aux anciens d'Ephèse réunis à Milet revêt les formes de l'avertissement prophétique à court terme et celui, plus poignant, des ultimes adieux avant la séparation définitive (Ac 20.17-38). Il existe encore un schéma analogue en 2 Timothée (chap. 4 en particulier).
La Seconde de Pierre s'inscrit dans ce même cadre. L'auteur y parle ouvertement de sa mort prochaine : c'est elle qui rend si pressante la communication dont cet écrit est le support (1.13ss).
L'enjeu
Un grave conflit secoue la chrétienté à la fin de l'âge apostolique, au moment où notre épître est mise en circulation. D'une certaine façon, à cette époque, il y a déjà une querelle des anciens et des modernes. En effet, si quelques-uns (les destinataires de la lettre) sont demeurés relativement fidèles, plusieurs se sont lancés à corps perdu dans la licence morale et intellectuelle.
Pour les combattre, la Seconde de Pierre s'attache à mettre en évidence une méthode de raisonnement : la référence au « canon » des Ecritures. Elle l'applique ensuite aux deux domaines de dévoiement déjà évoqués : le dérèglement des mœurs et celui de la théologie.
Le canon des Ecritures
En théologie biblique, le mot « canon » désigne la liste officielle (« homologuée », dira Origène) des écrits inspirés. C'est toujours au moment des bilans consécutifs aux crises graves que le peuple de la foi songe à réexaminer ce problème, car il s'agit, en dernière analyse, de déterminer où se trouve la vérité. Dans l'Evangile selon Luc, au lendemain de la Résurrection, la référence aux trois parties de l'Ancien Testament, Loi, Prophètes, Ecrits, apparaît déjà comme un recours profitable (voir Lc 24.27,32,44). La Seconde de Pierre suppose une démarche comparable en ce qui concerne, cette fois, le canon du Nouveau Testament (dont cet écrit esquisse déjà la clôture).
L'auteur tient, en effet, pour essentielle et définitive la référence aux apôtres et aux proches du cercle apostolique (3.2). Avec vigueur, il cite l'évangile (selon Matthieu ?), transportant ses lecteurs, en esprit, sur la montagne même de la Transfiguration, pour revivre l'investiture de leur Seigneur et Sauveur et renouer avec la parole prophétique (1.16ss). Il se réfère aussi aux lettres de l'apôtre Paul (3.15s), peut-être à l'Apocalypse (comparer 2P 2.15 et Ap 2.14), mais surtout, au chapitre 2, à l'épître de Jude (voir le tableau comparatif : les ressemblances et les différences entre les deux épîtres s'expliquent beaucoup mieux si Pierre a retravaillé Jude que dans l'hypothèse inverse).
Vraie connaissance et maîtres de mensonge
La Seconde de Pierre affectionne l'idée d'une connaissance de notre Seigneur Jésus-Christ (1.8), une connaissance objective qui constitue l'élément déterminant de la condition chrétienne. Ce vrai savoir, évoqué par sept fois (1.2,3,6,8,12,14,16), sera opposé, à la page suivante, à des pseudo-savoirs. Dans cette perspective, on peut reconnaître le souci d'une Eglise qui, face à l'hérésie naissante, met en avant la solidité du témoignage apostolique.
Le chapitre 2 donne un bel exemple de ce combat. On y voit l'auteur travailler pour ses lecteurs sur une page du Nouveau Testament (l'épître de Jude). Scriptura sacra sui ipsius interpres, dit un célèbre adage (« L'Ecriture sainte s'interprète elle-même »).
Les maîtres de mensonge ou faux docteurs (cf. 2.1) n'apparaissent sous ce nom que dans notre épître. Ils appartiennent manifestement à la communauté chrétienne. Ils rappellent les loups féroces qui, selon le livre des Actes, devaient s'introduire dans le troupeau après le départ de l'apôtre Paul (Ac 20.29).
Ces agents de subversion étaient-ils déjà les « gnostiques » devenus fameux au IIe siècle, qui prétendaient initier les chrétiens à une existence neuve et libérée grâce à la « connaissance » (en grec gnosis) de tous les mystères (voir « La question gnostique », p. {000Xgnose}) ? L'apôtre Paul les visait-il déjà en opposant la connaissance qui gonfle d'orgueil à l'amour qui construit (1Co 8.1) ?
En tout état de cause, les meilleurs éléments de réponse à ces adversaires sont apportés par l'épître de Jude, si largement évoquée dans notre épître. Se servant des procédés habituels de la démagogie, les maîtres de mensonge bernent les fidèles pour se remplir le ventre (2.13), voire les poches (2.3,14). Les plaisirs « charnels » (2.10,18) désignent au sens large toutes les goinfreries et toutes les licences acceptées au nom de faux principes. Ces sujets de réflexion, voire de conversion, demeurent toujours actuels.
Les notions rares
Au fil du discours, la Seconde de Pierre évoque des notions rares, telles les gloires (2.10), empruntées à l'épître de Jude. L'argumentation, déjà difficile, l'est rendue plus encore pour nous qui ne disposons pas de L'Assomption de Moïse, l'ouvrage auquel Jude se référait. En substance, le passage veut dire que c'est à Dieu seul qu'il appartient de juger ses anges, et non aux maîtres de mensonge au sein de l'Eglise.
Balaam est une figure bonne ou mauvaise selon les contextes où on le situe. En Nombres 31.16, l'ambiguïté est tranchée dans un sens négatif. La tradition ultérieure qui, dans cette ligne, voit en lui un personnage diabolique, est reprise par l'Apocalypse (2.14) comme elle l'est ici (2P 2.15). Le salaire de l'injustice évoque la cupidité de Balaam.
Comme un voleur dans la nuit
Le ton du chapitre 3 est neuf. On en a parfois déduit qu'il constituait une seconde lettre, tandis que la première, mentionnée en 3.1, serait faite des chapitres 1 et 2 de l'écrit (beaucoup estiment cependant plus vraisemblable que la « première lettre » soit tout simplement celle que nous appelons Première de Pierre). Quoi qu'il en soit, le fragment 3.1s opère un rappel de la méthode préconisée au chapitre 1 : il y a continuité entre les prophéties de l'Ancien Testament, l'Evangile et la tradition apostolique qui le véhicule. Ainsi, le retard de l'avènement du Christ est un faux problème né d'une triple méconnaissance des saintes Ecritures. Il faut souligner, en effet, les points suivants :
–la notion de temps n'est pas la même pour le Seigneur et pour nous (Ps 90.4, cité en 2P 3.8) ;
– il faut tenir compte de la patience de Dieu laissant aux hommes le temps de se convertir (3.9) ;
– le thème du voleur dans la nuit (3.10), présent déjà chez l'apôtre Paul (1Th 5.2) et chez l'évangéliste Matthieu (chap. 24), souligne le caractère absolument imprévisible de cette venue soudaine du Seigneur. Quiconque prétend connaître à l'avance la chronologie s'égare lui-même et égare les autres (Mt 24.36). Qui entend l'avertissement veille et redouble de zèle et d'espérance (2P 3.11ss).
Les temps changent, les générations passent, la science profane se développe, mais parallèlement l'humanité est de plus en plus convaincue d'habiter un monde limité dans son espace et dans son temps. L'éternelle réflexion des humains passe encore et toujours par l'angoisse de l'avenir. Le testament spirituel de l'apôtre montre quelle liberté communique dans ce monde la sûre parole de l'Evangile.

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